BEFORE THE NIGHT IS OVER

Before The Night Is Over, Galerie Intervalle, Paris, 2023

©Alexandre Wallon

En 2024, la Galerie Esther Woerdehoff présente So Far So Close, solo show réuinissant trois séries qui interogent notre rapport aux limites. A travers des images qui constatent progressivement l’évanouissement de la figuration dans son travail, Julien Mignot nous pose sérieusement la question de ce qui se joue à la lisère du monde réel. Il utilise celui-ci comme matière première, ne trahissant pas la photographie en l’employant pour sa seule technicité, il l’abstraction s’invente à partir du réel et non du medium.

Trois séries sont présentées. La première, Before The Night Is Over, compile des situations, des paysages, des nus, qu’elle semble affranchir de leur ancrage dasn la réalité. Les contours disparaissent sans un sfumato picturale souligné par le procédé Fresson, les peaux se fondent dans le décors, les montagnes dédolent en apesanteur, le pont de Brooklyn devient une peinture. Ce sont les prémisces d’une dérive vers une photographie qui s’affranchira désormais de la figuration.

« Des trains à travers la plaine. » Les images de Julien Mignot évoquent quelque chose de ces mots que chantait Alain Bashung, à la façon d’un point de vue : comme si le monde était saisi de quelque chose de mouvant et qui laisse passer une lumière de l’instant déjà traversé, déjà reparti, et dont demeure le souvenir. Souviens-toi de m’oublier? Semblent, comme dirait l’autre, murmurer ces photos. Elles sont de fait le fruit de moments d’oubli, qui existent entre les prises de vue des travaux ou commandes. Elles sont des interstices, des déliés qui laissent filtrer un fragment de vie au moment où il n’y a rien à faire, que prendre un traverser, parcourir une plaine, se souvenir d’oublier, mais garder à l’esprit la matière de la lueur, à travers les arbres, les corps, les désirs traversés.

Joseph Ghosn